• L'attaque du fourgon de Gentilly by Ferrara en 2000

    L'attaque du fourgon de la Brink's n'a duré que «cinq à huit minutes». La cour d'assises de Paris y consacre cinq semaines. Les treize accusés, qui passent pour des experts en la matière, écoutent les policiers de la brigade de répression du banditisme (BRB) décortiquer ce gros coup à 41 millions de francs (6,3 millions d'euros), mine de rien, avec l'air détaché de mecs pas concernés. Le 26 décembre 2000, à 13 h 50, un fourgon blindé de la Brink's démarre d'un dépôt du CIC à Gentilly (Val-de-Marne), chargé à bloc. Il emporte vers la Banque de France à Lognes «la recette de Noël de grands magasins, une grosse cinquantaine de sacs qui contiennent chacun des liasses de mille billets de différentes coupures, jusqu'à dix à quinze kilos par sacs, en tout 81 millions de francs, raconte Jean-Luc Saux, alors commandant à la BRB, une quantité exceptionnelle d'argent». Et ce n'était pas prévu. «Deux fourgons de la Brink's devaient se partager le montant. Manque de chance, le second a eu du retard dans sa tournée, et l'intégralité a été chargée dans le premier à pénétrer le site du CIC.» Les bandits ne s'y trompent pas.
    «Etanche». En effet, «le second équipage, qui doit alors servir d'escorte ou de leurre, se gare sur la place de la porte-de-Gentilly, se retrouve en plein milieu du dispositif des malfaiteurs, essuie des tirs nourris, passe la première et réussit à s'enfuir». Les bandits n'ont pas cherché à le «bloquer» : «peut-être savaient-ils qu'il était vide», informés, soit «par des gens du CIC, de la Brink's, du comptage ou des magasins, c'est pas étanche». Bien tuyautés, les bandits ciblent aussitôt la «tirelire ambulante» qui a roulé sur 300 mètres rue Paul-Vaillant-Couturier et débouche au carrefour. Ils barrent sa route avec un camion de déménagement de 19 tonnes, la coincent derrière avec une Jeep Cherokee. Ils descendent, cagoulés et armés de fusils d'assaut, bloquent avec des cales les roues du véhicule de la Brink's. Ils provoquent «une énorme déflagration» qui «arrache le double blindage» et «ouvre une brèche» à l'arrière selon «la technique du cadre» : «Ils apposent contre la portière un cadre de métal léger, genre alu, dans lequel ils ont inséré un boudin en plastique rempli d'un explosif brisant, avec un détonateur et une mèche lente. Mis à feu, ça fait un effet flèche, comme une roquette qui découpe la carrosserie et perce une fenêtre de 1 mètre de haut sur 80 cm de large.» Ils attrapent les sacs à l'intérieur, « laissent la moitié du butin, ne pouvant pas s'éterniser malgré leur parfaite organisation». Ils les enfournent dans trois voitures de repli. Postés tout autour, «des malfaiteurs empêchent quiconque de s'approcher». Ils incendient le camion de déménagement et le 4x4 volés. Et s'enfuient à toute blinde à bord d'une Audi Break, d'une Renault Espace et d'une Golf V6, équipées de gyrophares. Ils croisent une patrouille de police à la Poterne des Peupliers, et font feu.
    Coup de bol ou maîtrise de l'art, les assaillants du fourgon de la Brink's n'ont fait ni mort ni blessé. Ils ont néanmoins laissé par terre  65 projectiles, de gros calibre. La BRB ne rapplique qu'une heure plus tard, occupée à un «petit repas de convivialité pour Noël, dans un restaurant du côté de la gare du Nord», et sont «7 au lieu de 14» à cause des vacances. Quand Jean-Luc Saux débarque enfin porte de Gentilly, «c'est Beyrouth : une scène apocalyptique». Temps humide et neige carbonique, «véhicules calcinés», chaussée jonchée d' «étuis et de douilles»,  «bouts de tôle», «billets épars». Alertés par la détonation, deux témoins ont filmé et photographié la fin de l'attaque. Le vidéaste a vendu ses images à TF1, et l'employé d'une société de reprographie a «négocié ses photos numériques 500 000 francs» avec Paris Match .
    Melting-pot. A la barre, l'enquêteur compte les «malfaiteurs» sur place : «au moins dix». Puis en rajoute : «plus probablement 13, 14 ou 15». Me Dupont-Moretti, pour la défense, l'alpague : «C'est pifométrique ?»  «Non, technique.» Le policier revient à «11», avec «l'homme qui donne le top départ du fourgon». Il remarque que «depuis la mise à mal de cette équipe de malfaiteurs, il n'y a plus eu de telles attaques de fourgons blindés», et déclenche des «oohh, aahh» réprobateurs dans le box des accusés et les rangs de la défense : «C'était la plus grosse affaire que j'ai connue, une belle attaque ! Avec du professionnalisme et une parfaite organisation. On ne peut pas s'improviser braqueur de fourgon en cinq minutes.» Il balaie de la main le melting-pot de «spécialistes» supposés dans le prétoire, trois de Perpignan, deux Marseillais, un Corse, un expatrié en Espagne, deux de la banlieue parisienne. «Chacun des membres a son réseau, sa région et ses informations. Si y a quelque chose d'intéressant, on se réunit et on monte ou non l'opération», salue le traqueur de bandits.

  • Commentaires

    1
    manorax
    Vendredi 16 Octobre 2009 à 14:46
    cest lun des meilleurs attaques de fourgon des année 2000
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