• Affaire Erignac : l'heure du procès pour Colonna

    Le 6 février 1998, le préfét de Corse Claude Erignac était abattu de trois balles dans la nuque. Près de dix ans après , Yvan Colonna, le nationaliste soupçonné d'avoir exécuté le plus haut représentant de l'Etat sur l'île, comparaît à partir de ce lundi - et pour une durée d'un mois- devant la cour d'assises spéciale de Paris.

    Un berger dans la tourmente

    Pour l'accusation, ce berger corse de 47 ans appartient au "groupe des anonymes" : sept nationalistes de Corse-du-Sud, déçus des mouvements historiques alors en pleine lutte fratricide, qui ont planifié cet assassinat dans les rues d'Ajaccio, alors que le préfet se rendait à pied à un concert après avoir garé sa voiture. Ses six complices présumés sont déjà derrière les verrous, condamnés en juillet 2003 à des peines de 15 ans de réclusion à la perpétuité. Deux autres nationalistes, considérés par les enquêteurs comme les "cerveaux" de l'opération, ont été acquittés en appel de ce crime.

    Si Colonna comparaît seul aujourd'hui, c'est que la police n'a pu l'appréhender dans le maquis corse qu'en juillet 2003, après plus de quatre ans de cavale. Ses amis sont alors en plein procès, que le juge se refusera à interrompre malgré ce rebondissement. Depuis, Colonna affirme son innocence et dit n'avoir pris la fuite que parce qu'il semblait condamné d'avance. Le soir du drame, assure-t-il, il cherchait dans la montagne des chèvres égarées de son troupeau.

    "Serein et déterminé"


    Le berger arrive d'ailleurs au tribunal avec un casier judiciaire vierge, même si son nom a été mêlé dès les années 80 à plusieurs épisodes de la violente lutte nationaliste. "Il est serein et déterminé", dit son avocat Me Gilles Simeoni, qui a fait citer de nombreux policiers, sans doute pour tenter d'accréditer la thèse d'une enquête biaisée, où les témoins auraient été intimidés.

    Car ce sont les membres du commando qui font peser sur Yvan Colonna les plus lourdes charges, l'ayant désigné comme un des leurs, lui plaçant même l'arme entre les mains avant de se rétracter en expliquant leurs dénonciations par des "pressions" policières. Une fois condamné, alors donc qu'il ne risque plus rien pénalement, Pierre Alessandri, ami d'enfance de Colonna, s'accusera même du meurtre en septembre 2004, une confession jugée "confuse et imprécise" par les enquêteurs.

    Absence de preuves matérielles

    L'accusation dispose aussi d'innombrables relevés de communications par téléphones portables qui placent Colonna sur le lieu du crime, à son repérage et aux réunions préparatoires. Quant à l'arme, elle a été retrouvée près du corps du préfet, en guise de signature puisqu'elle provenait d'une attaque en septembre 1997 de la gendarmerie de Pietrosella, dont le berger devra aussi répondre.

    Ses défenseurs soulignent "l'absence de preuves matérielles", ce qui fait bondir Me Philippe Lemaire, avocat de la veuve du préfet, Dominique Erignac. "Vous voudriez que Colonna ait craché sur le préfet pour qu'il y ait de l'ADN. C'est ridicule", s'indigne-t-il, en rappelant qu'à la cour d'assises, c'est "l'intime conviction" qui compte. Les aveux tardifs d'Alessandri, "frère d'arme" de Colonna, il les juge "ridicules".

    Colonna att
    aque Sarkozy

    Les sept magistrats de cette cour spéciale, juridiction compétente notamment en matière de terrorisme, devront trancher le 12 décembre, après un mois de procès où sont attendus des dizaines de témoins. Colonna a d'avance accusé cette "justice d'exception" de partialité. Le nationaliste a déjà traîné Nicolas Sarkozy devant les tribunaux, l'accusant d'avoir ignoré sa présomption d'innocence lorsqu'il était ministre de l'Intérieur. Débouté, Colonna a fait appel.


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